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Nuit d'orages 7

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Lue : 9805 fois - Commentaire(s) : 2 - Histoire postée le 31/03/2012

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Sophie entre d'un pas lourd dans l'ascenseur, la tête hantée de souvenirs heureux, croustillants, inoubliables. Viennent à elle des images de fous rires, de douces moqueries, d'anecdotes. Elle s'évade dans ce passé où elle et Camille ont vécu des instants gravés à jamais dans sa mémoire. Un doux sourire illumine un court instant son visage et fait pétiller ses yeux tristes : La cabine d'essayage, la farce de leur amie restauratrice, la signature de l'acte définitif chez le notaire et le pied baladeur de Camille, puis, la poursuite du rôdeur dans le jardin de leur villa, les mots incompréhensibles et puis..et puis...Dur retour à la réalité. L'amour de sa vie, son amie, sa compagne, sa maîtresse, sa femme, gît dans cette chambre triste et blafarde dans l'attente d'un retour incertain à la vie. Aspirée dans ses pensées, elle manque de laisser les portes de l'ascenseur se refermer alors qu'elle est arrivée à destination. Adeline l'aperçoit au loin et l'invite à la rejoindre.

« Ca va Sophie ?
-Je te remercie, oui, ça va.
-Joins-toi à moi. Tu veux quoi ? Assieds-toi, dis-moi...., je vais te le chercher.
-N'importe quoi, ça n'a aucune espèce d'importance. Choisis pour moi. J'ai pas faim de toute façon.
-Ah non hein, t'as rien avalé de la journée je parie. Tu dois manger. Camille doit retrouver sa petite femme en pleine forme.
-Se rappellera-t-elle seulement de moi à son réveil ? Saura-t-elle qui elle est ? Se souviendra-t-elle de nous ?
-Chérie, arrête de penser au pire. Tu sais aussi bien que moi qu'elle peut recouvrer toutes ses facultés.
-Certes, mais le pourcentage est si faible.
-Oui, mais il existe. Tu dois y croire, tu dois croire en la chance et avoir confiance en la vie... je vais te chercher quelque chose à grignoter.
-Je me contenterai d'une salade.
-Ok..Je reviens, j'en ai pour 2 minutes. »


20h55, alors que les portes d'accès aux visiteurs sont sur le point d'être closes, une silhouette se glisse furtivement à l'intérieur de l'établissement hospitalier, déjouant la surveillance du gardien de nuit occupé à discuter avec un agent de surface s'apprêtant à l'entretien du sol de l'entrée. Elle se dirige rapidement vers l'escalier de service dont la porte coupe-feu se ferme sans bruit après son passage. Satisfaite, l'intruse se dirige à l'étage de neurologie. Elle connaît parfaitement l'endroit pour s'y être rendue en repérage dans l'après-midi. Pauline, se faufile dans la salle de détente du personnel et subtilise une blouse à peu près de sa taille. Il va falloir jouer serrer. S'introduire dans un hôpital tard le soir n'est pas difficile, mais sa présence dans un service où le personnel est restreint peut paraître vite suspect. Elle a dans sa poche son ticket de sortie, un aller simple pour son nouveau bonheur avec Sophie, un aller sans retour pour Camille. Une simple bulle d'air dans sa perfusion et le tour est joué. Tout le monde pensera que Camille n'a pas survécu à son accident vasculaire cérébral. La chambre de sa future victime n'est plus très loin. Jusqu'à présent, tout son plan se déroule sans anicroche. Il ne lui reste plus qu'à espérer que personne ne sera dans la pièce au moment où elle y pénétrera ou, encore pire, que quelqu'un la surprenne au moment où elle poussera la bulle dans la perfusion de Camille. Passant devant le bureau de l'infirmière en chef, elle entend des éclats de rire qui s'échappent par la porte entrouverte. Un regard à gauche, un regard à droite, la voie est libre, la chambre est juste à quelques mètres.

Pauline ouvre la porte pour la refermer aussitôt. Le temps s'arrête. Elle observe la malade, inerte, immobile, totalement à sa merci. Camille respire seule depuis l'après-midi, mais n'a toujours par repris conscience. Pauline savoure déjà sa victoire, elle observe cette briseuse de bonheur et s'approche d'elle, lentement, très lentement. Le regard noir et empli de haine, elle retire de sa poche la seringue qu'elle s'est procurée et active le piston, aspirant l'air ambiant. Elle étudie avec soin les tubulures et repère vite une voie centrale. Sans hésitation aucune, la main sûre, elle engage l'aiguille dans le cathéter. Un fracas dans le couloir, juste devant la porte la fait sursauter soudain. Le temps de ranger en catastrophe son arme dans la poche, la porte s'ouvre. Pauline, cachée tant bien que mal dans la pénombre, derrière les appareils de contrôle, reconnaît la silhouette féline de Sophie.
« Attends, je vais te donner un coup de main.
-Merci Adeline !
-Non mais quel foutoir ton sac ma belle ! Comment on peut mettre autant de bordel là-dedans ? Lâche Adeline pour détendre son amie
-C'est l'hôpital qui se fout de la charité répond Sophie. Qu'est-ce-que tu fiches ici ?
-Tu as oublié ton téléphone à la caf chérie.
-Ah....ffff, merci.
-Tu crois pas que tu devrais rentrer et dormir ? Elle est tirée d'affaire, son système neurovégétatif est intact, elle ne risque plus rien. Tu dois rentrer te reposer.
-Non, je veux rester ici au cas où elle se réveillerait. Tu sais, je comprends la douleur et l'inquiétude de tous ces gens qui sont dans l'attente et l'espoir. Je sais à présent ce qu'ils ressentent puisque je le vis. Non, je veux rester.
-Je sais chérie, et moi, ça me fait du mal de te voir dépérir ainsi. Tu dois prendre soin de toi. Tu seras tout à loisir d'être avec elle. N'oublie pas que tu bosses tôt demain matin Sophie.
-Je le sais, mais la nuit s'avance et je serai déjà sur place
-Comme tête de mule, on ne fait pas mieux...Mais va, je te comprends.
-Elle est tout ce que j'ai Adeline. Mon métier, le fric, tout le reste n'a plus aucune importance sans elle.
-Je sais..je sais » répond Adeline en caressant tendrement le visage de son amie. « Allez, essaie de dormir un peu, on se voit demain » . Adeline dépose un baiser sur la joue de son amie et se dirige vers la sortie.
« ah, au fait, Bertrand me fait te dire qu'il t'a laissé le dossier que tu lui as demandé sur le desk du secrétariat.
-Ok, je te remercie, je vais aller le chercher, ça m'occupera un peu les idées en attendant que le sommeil ne vienne me chercher. Si toutefois il arrive.
-A demain
-A demain, bonne nuit, et encore merci »

Sophie prend la direction de la sortie et n'entend pas le soupir de soulagement de Pauline toujours tapie dans la pénombre de la pièce. Elle fouille patiemment son sac à la recherche de son autre téléphone portable, le professionnel, celui où toutes ses notes en rapport au dossier sont enregistrées. Elle n'a pas le temps de mettre en route l'appareil qu'une main puissante l'agrippe à la gorge et, d'une force incroyable la plaque contre le mur, broyant son larynx.
« Crève ordure. »

Dans les yeux de Sophie, l'horreur absolue mais également l'étonnement lorsqu'elle découvre, par le rai de lumière qui entre par la porte restée entrouverte, le visage de son agresseur. Elle a chaud, elle étouffe. L'homme serre tellement fort qu'aucun son ne sort de sa bouche. Elle sent contre son visage le souffle de la haine. Un rictus machiavélique sur ses lèvres écumantes, l'homme appuie accentue sa pression sur la trachée de Sophie dont le souffle commence à manquer dangereusement. Soudain, un cri, un faciès de douleur. L'homme lâche son emprise sur Sophie qui glisse le long de la paroi et s'écroule au sol, main à sa gorge, le souffle court.
« Je t'interdis de la toucher »
L'homme, n'a pas le temps de riposter qu'un second coup le frappe au visage, puis un troisième. Il titube, à moitié étourdi et se retourne sur son agresseur, hagard.
« Toi ?
-je t'interdis de la toucher, tu m'entends ? »

Telle une furie, Pauline se saisit de sa seringue et vient la figer de toutes ses forces dans l'oeil gauche de Joël Fronsac, l'homme pour qui elle avait quitté Sophie. Les mains sur son visage, l'homme s'agenouille sous l'emprise d'une douleur atroce qui déchire son crâne. Un important filet de sang noir se déverse sur sa chemise blanche alors qu'il titube et percute le lit où gît Camille. Pauline, toujours armée du sac lourd de Sophie lui assène un coup violent derrière la nuque. Joël Fronsac s'effondre entraînant dans sa chute, la potence qui se fracasse contre le sol.

Sophie, même si elle déglutit difficilement, récupère peu à peu ses facultés. Incrédule, elle dévisage la femme rousse qui lui a sauvé la vie, mais dont la voix rocailleuse à trahi l'identité. Joël Fronsac reprend péniblement ses esprits. L'oeil horriblement douloureux et le crâne en proie à des maux insupportables, il parvient néanmoins à se relever et à tenir sur ses deux jambes. Le pas hésitant, il se dirige vers la pulpeuse rousse, les mains en avant, un rictus de haine sur son visage ensanglanté mais trébuche sur le pied de la potence qu'il a renversée. Les réflexes diminués, il chute lourdement en avant, le nez percutant violemment le sol, poussant plus profond encore dans son œil, la seringue qui y était restée fichée.

Pauline, enfermée dans sa folie destructrice et dans une haine sans limite pour Camille, se penche sur le cadavre et récupère la seringue dans l'espoir fou qu'elle soit en bon état et de finir sa tâche. Voyant qu'elle est devenue inutilisable, Pauline, rageuse, se jette sur Camille et se met en quête à arracher une à une ses perfusions. Son geste meurtrier est stoppé net dans son élan par un bras ferme et déterminé, celui de Sophie.
« Ne la touche pas !
-Chérie, mais qu'est-ce-qu'il te prend ? Laisse-moi faire voyons.
-J'ai dit ne la touche pas !
-Mais c'est moi que tu aimes voyons !
- T'es devenue complètement folle !..
-Tu me remercieras quand tu comprendras... »


Pauline, dans un dernier élan d'espoir bouscule violemment Sophie qui va s'étaler sur le mur opposé avant de se relever courageusement et de la bousculer alors qu'elle s'apprête à finir sa noire besogne.

La porte de la chambre s'ouvre bruyamment, claquant contre le mur. « Qu'est-ce-que... » Après avoir actionné l'interrupteur, Bertrand, qui venait saluer Sophie, suivi de deux personnels se précipite à l'intérieur de la pièce, jugeant le triste spectacle qui s'offre à leurs yeux. Les deux infirmiers se ruent sur Pauline toujours en proie à sa crise de démence et finissent par l'immobiliser au bout d'interminables secondes. Bertrand, de son côté presse le bouton de l'alarme de nuit. Voyant Sophie consciente, il se précipite alors sur le corps sans vie de Joël Fronsac. Repérant aussitôt du liquide cérébral s'écouler par la plaie béante de l'oeil, il comprend qu'il n'y a plus rien à faire.

« Appelez la sécurité...Sophie, Sophie, ma chérie, tu n'as rien ?
-Elle a, elle a voulu tuer Camille..il est arrivé pour me tuer...Ils se sont battus..
-Chhhhhhhhhhhhhhut..c'est fini ma puce..c'est fini..Ca va ? Tu n'as rien ?
-Il a essayé de m'étrangler..et il y serait parvenu si elle avait pas été là..Elle était déjà là...mon dieu..et si moi j'étais pas arrivée, elle aurait tué Camille..C'est une histoire de fou !
-Mais qui sont-ils ?
-Pauline, mon ex.
-Celle qui...
-Oui, celle qui..et qui, visiblement comptait me récupérer en éliminant Camille. Mais comment savait-elle que Camille était ici ? » Puis, s'adressant à Pauline.
-Comment savais-tu ?
-Je te croyais plus intelligente que ça chérie !
….
Tu me déçois beaucoup !
Tu es...tu es.. C'est toi Mme Brosec. Il ne peut en être autrement.
-Bravo chérie...Ça t'en bouche un coin hein ? Tu peux être fière d'avoir une femme fidèle..Puisque la stratégie pour la détourner de toi et la pousser à la faute n'a pas fonctionné, je me demandais ce que j'allais bien pouvoir inventer mais la chance a été avec moi quand Pauline, la secrétaire, pauvre andouille, m'a dit ce qui lui était arrivé. Je pouvais pas laisser passer une occasion pareille hein..Mais j'avais pas prévu que cet abruti avait prévu le même sort, mais pour toi... Comment tu trouves ma transformation chérie ? Ça te plaît? J'ai fait tout ça pour toi Sophie. Je t'ai sauvé la vie. Et vois comment tu me remercies..
-Tu es complètement dingue..Bertrand, sors la d'ici s'il te plaît ou je vais vomir.
-Ouaip, tiens, tu vas être exaucée, y'a les flics... »



« Tu te rends compte ma chérie ? Il voulait me supprimer pour récupérer Pauline et Pauline voulait te supprimer pour me récupérer moi..Et tu sais, la police m'a dit que c'est lui qui était chez nous cette fameuse nuit. En s'enfuyant avec sa Mercedes, il a défoncé sa portière arrière contre le réverbère jouxtant à la propriété.
- et Mme Brosec ? Enfin, je veux dire Pauline ? Elle m'a bien eue elle tiens..J'y ai vu que du feu..
-En taule mais elle va être très certainement reconnue irresponsable de ses actes, tu t'en doutes.
-C'est effrayant. J'ai moi-même plaidé la folie pendant de nombreux procès et au vu de ce qui s'est passé pour nous, je préférerais qu'elle croupisse derrière les barreaux..
-Quoiqu'il en soit mon cœur, elle ne pourra plus nous nuire...
-Bon, quand c'est que je rentre à la maison bébé ?
-Tu es en pleine forme chérie. Bertrand m'a dit que tu pourrais rentrer d'ici la fin de la semaine.
-Cool..et le boulot ?
-Ah, là faudra être un peu plus patiente hein ? Je vais m'occuper de toi, je vais te bichonner, te dorloter..
-mmmmmmmm, quel bon programme..
-Je t'aime ma petite femme d'amour.... »
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Commentaires du récit : Nuit d'orages 7

Le 02/12/2017 - 13:21 par gailuron69
Quelle superbe série.A la lire on a du regret à n'être qu'un homme ...

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