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La gardienne du Crépuscule

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Lue : 976 fois - Commentaire(s) : 1 - Histoire postée le 25/05/2020

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Dans ses yeux noirs se met à scintiller cette lueur pourpre. C'est toujours à ce moment que ça arrive. Je me fais peut-être des idées... Mais de toutes façons je n'y parviens toujours pas. À cet instant toujours je me fige sur place. Puis lorsqu'elle regarde ailleurs, moi je regarde ses lèvres. Naturellement incurvées vers le bas, lui donnant cet air consciencieux, accentué par ses pommettes saillantes et son regard pénétrant. Vraiment, cette femme sait tenir quelqu'un en place rien qu'en plissant les paupières. Elle me paralyse, c'est comme si mes jambes voulaient s'enfoncer dans le sol. Pourtant, à l'intérieur de mon abdomen, quelque chose me supplie de passer mes bras autour de sa taille. Mon regard s'égare dans les reliefs des ombres sur la courbe de ses hanches. Puis la cambrure de ses reins...

Le vent qui balaie ses mèches couleur sable ondulées dévoile parfois sa nuque. Mon corps entier me hurle d'aller poser mes lèvres dans le creux de son cou, en demeurant incapable de l'approcher davantage. Atroce torture de chaque soir, que d'être un lâche en amour. Je suis bien meilleur au combat, mais à quoi me sert-il de préserver ma vie si je suis incapable d'en faire quelque chose ? Ne serait-ce que tenter...

Elle me regarde. Je le sens jusque dans mon ventre. Je crois que la lueur dans ses yeux se fait plus intense. C'est peut-être mon imagination. Elle se détourne à nouveau vers la demi sphère restante du soleil, puis s'assoit. Je reste béa quelques secondes. Elle me jette un regard en posant sa main gauche sur le sol à côté d'elle.

Je sens enfin mes jambes qui se descellent. Maladroitement, je prends place à ses côtés. Elle pose sa main sur son front, soupire d'agacement, puis se colle à moi. Son bras passe derrière mon dos, et sa tête se pose sur mon épaulière. Si je regrette tout ce barda de protections, j'ose enfin approcher ma main de sa hanche opposée, qui remonte finalement sur son épaulière. Saloperie d'équipement...

Je ferme les yeux quelques secondes, prends de longues et profondes respirations en silence. Je parviens à me détendre. Son parfum fleuri n'y est pas pour rien, tout comme sa douceur soudaine et la chaleur qu'elle dégage. Je suis troublé. Je sens la caresse de ses mèches ondulées sur ma nuque, dans mon cou... J'en peux plus. Je tourne la tête et dépose un tendre baiser sur son front toujours dégagé de ses longs cheveux. Puis un second, et un autre qui se perd dans le vide. Elle me regarde de face, les yeux grands ouverts, sourcils levés. Je ne sais pas comment juger son expression. Mon cœur rate un battement. J'ai sûrement fait une connerie...

« Aleeeeeeerte !!! » Plus le temps de réfléchir. On choppe nos ceintures, on se relève d'un bond et on fonce en direction du campement. À peine arrivés, on entend déjà le fracas de l'acier contre l'acier. Des brigands troglodytes plutôt bien équipés, environ une soixantaine. On s'engage dans la bataille désordonnée. On aurait du être là au moment où ils ont lancé l'attaque... Je dévie du revers ma lame une hache de bataille portée par un adroit colosse. Naylae avorte ma riposte en traversant sa gorge de son sabre avec sa gracieuse et impitoyable dextérité. Ses yeux éclatants d'argent poli croisent le mien un bref instant. Jusqu'à quel point va-t-elle me frustrer, à la fin ?

Je la regarde du coin de l'œil commencer à malmener un autre assaillant moins imposant, tandis que de mon côté j'évite par deux fois de me faire embrocher par une lance. Je dévie un troisième coup, je feinte une estocade pour occuper le bouclier, puis je tranche horizontalement juste sous la mâchoire. Je jette un œil en direction de Naylae, dont l'adversaire s'écroule inerte, pendant que le mien convulse dans des gerbes pourpres.

Le type qui arrive derrière blêmit presque en voyant ses camarades baignés dans leur sang. Les deux autres qui accourent après lui semblent lui redonner soudainement l'entrain nécessaire à nous charger. J'en prends directement deux à parti. Je laisse celui qui patauge dans ses fringues pour mon aimée. Pour moi, un costaud trapu avec une hache d'arme et un bouclier, et un grand qui agite habilement une étoile du soir.

Comme mon instinct me l'avait suggéré juste avant, ils m'attaquent de façon coordonnée. J'esquive d'un pas vif en arrière une fois, deux fois. La troisième fois, le grand me laisse une ouverture. Je me glisse d'un pas leste sur sa gauche de façon à le placer entre le trapu et moi, et je lui éclate la carotide de la pointe de la lame. Je le repousse aussitôt du pied sur son partenaire. Déstabilisé et déséquilibré, ce dernier n'a pas le temps de réagir à mon couteau de lancer qui vient lui perforer le thorax dans un bruit sinistre.

J'en capte un autre qui arrive sur mon flanc droit en courant un peu trop inconsciemment. J'évite aisément son épée longue en pivotant d'un volte-face, je tranche l'arrière de son genou droit puis, juste avant qu'il ne s'écroule, sa nuque. Je constate que Naylae s'est chargée d'un autre bandit, et que la poignée restante prend la fuite. Deux... Trois blessés. Deux légers, et un autre qui y restera peut-être... Merde, si on s'était pas isolés...

Elle me jette un regard dur. De la colère. Non, on aurait pas du s'éloigner du camp, et j'aurais jamais du faire ça...



* * *



Quelques jours se sont écoulés. Notre blessé grave survivra. Pas d'attaque depuis cette fois-là. Aucun échange non plus entre elle et moi, si ce n'est les formalités concernant la compagnie. C'est froid et tendu entre nous. La colère remplace peu à peu ma honte. Contre moi, l'idiot maladroit. Et contre elle aussi, que je n'arrive pas à comprendre. Elle veut quoi de moi, au fond ? Est-ce qu'elle-même le sait, déjà ? Je la regarde en coin en train de griffonner le papier dans sa tente. Je sais qu'elle ne me remarquera pas, trop concentrée dans ses calculs.

Je la vois bougonner, s'agiter d'agacement. Je détourne le regard juste à temps, car je sens le sien qui me flagelle la joue. La honte me revient, je prie pour ne pas rougir sur place. Puis merde. Je soupire en me levant, je tape du pied dans la première pierre qui se met sur mon chemin en grognant. Mi frustration, mi spectacle...

Ces derniers jours m'ont foutu les nerfs à vif. J'ai parfois envie de décamper loin d'elle et de ses manières de démone. Je m'enfonce dans la forêt qui borde le camp. Le petit ruisseau m'apaise de son écoulement constant. Je m'allonge avec mes pensées chaotiques. Le bruit de l'eau me berce, emporte mes songes avec lui...

« Clac, clac, clac, clac... »

Je me suis assoupi. C'est un autre bruit qui vient me tirer de mes songes profonds. Puis un gémissement. L'agacement remonte en flèche. Putain de frustration. C'est peut-être pas ce que je m'imagine... Je me lève en grommelant et me dirige en direction des sons. Je n'ai pas bien loin à faire en longeant le ruisseau pour découvrir nos deux jeunes amants en pleine fougue, trop concentrés dans leur affaire pour m’apercevoir. Gêné, je me cache à leurs regards. Frustré, je ne parviens pourtant pas à m'éclipser. Je reconnais facilement Aeline et sa chevelure noire, le buste contre un arbre, pantalon baissé et croupe tendue. Derrière elle, c'est Argo et ses trapèzes démesurés, qui déchaîne sa passion dans ces claquements de chair qui m'ont ruiné le sommeil.

J'observe la saillie sauvage, avec tout mon désir contenu dans une érection inconfortable prête à exploser d'un moment à l'autre. Le salopard... Il sait se débrouiller, contrairement à moi. Aeline se cambre contre l'arbre, semblant vouloir offrir encore plus sa chair métissée à son assaillant. J'entends sa respiration, et les gémissements qui s'en échappent, de moins en moins saccadés, de plus en plus nets et audibles. Argo l'attrape tendrement par la poitrine et s'enfonce plus fort, plus amplement. Elle se retient difficilement, sa bouche s'ouvre en grand mais rien ne sort. Puis elle explose, se laisse aller. Ses poumons se vident, Argo aussi. Les bras en arrière, elle le retient contre elle, en elle, quelques longues secondes.

Ils sourient et se cajolent. Mon cœur bat la chamade, je suis cerné par la frustration. Je m'assoie, j'essaie de me calmer. Je dois être rouge comme un piment. Qu'est-ce qui cloche avec moi, bordel de merde ? Suis-je repoussant à ce point ? Argo a autant de cicatrices que moi. Il est bien plus musclé, aussi... Est-ce que c'est juste ça ? Rha... Je dois me détendre. En tant que lieutenant, je ne peux pas me montrer ainsi. Et s'ils savaient que je suis... ? Merde, pense à autre chose, obsédé complexé !

Je parviens à calmer ma verge palpitante. Lorsque je reviens au campement, le crépuscule d'été s'installe doucement. Je n'ai même pas le cœur à regarder le ciel. Je m'allonge sur mon lit de camp, et je prie mon esprit de ne penser à rien d'autre qu'aux tâches qui m'attendent demain. Trop tard...

« Ah, t'es là. » Voilà justement Argo. En réponse, je me contente de m'asseoir et le traverser du regard. « Oh là... Ça va pas ? » Je grogne et je détourne le regard à l'horizon. Il est sûrement plus d'humeur à causer que moi, c'est certain. « C'est Naylae, elle t'a pas vu revenir. Je crois qu'elle est partie te chercher. » Je lâche un nouveau grognement et je me recouche en lui tournant le dos. Qu'ils aillent au diable. Tous. « Bien, bien... Je vais lui dire que t'es rentré. » Je me retourne pour lui jeter un nouveau regard noir, mais je n’atteins que son large dos. Je soupire. J'en ai marre.

Quelques minutes plus tard, je le vois revenir. Naylae ne tarde pas non plus. Elle passe à côté de moi sans s'arrêter et regagne sa tente. Elle ne m'a même pas regardé. Je m'enroule dans ma couverture, profondément blessé. Cette maudite nuit va être longue...



* * *



On a parcouru la moitié de la montagne. La route en descente est bien plus aisée, bien que dangereuse si on se relâche trop. Ce matin, deux des trois carrioles ont manqué de se renverser sur le côté. Sacré coup de chaud, mais ça nous a fait redoubler de vigilance, les gars manœuvrent en plus grand nombre et avec plus de précautions. En perdre rien qu'une nous mettrait dans une belle merde, tiens...

Naylae est à quelques pas devant moi. C'est à peine si je la regarde. Ces derniers jours m'ont plutôt aidé à me détacher d'elle et de mes fausses idées. On ne parle toujours plus, mais on a réussi à mettre de côté nos hostilités pour se concentrer sur la mission. Comme au début, lorsque je suis arrivé dans cette compagnie. Je la trouve resplendissante et charismatique, mais je reste méfiant. Ça n'aurait jamais du changer.

Le soleil revêt les teintes orangées de sa lente chute vers l'horizon. Nous arrivons dans un bosquet, plutôt accueillant. Plus loin, une cascade fait entendre sa présence. Naylae donne les instructions habituelles pour le campement et les tours de gardes. C'est à mon tour de faire les deux premières heures. Une fois tout en place, je prends mon rôle.

Je regarde l'encre noire bleutée envahir le ciel. Ce soir, la lune sera pleine. J'essaie de ne pas ruminer sur l'échec vivant que je suis. Je pense à l'après. Une fois la mission honorée, je pense rompre mon contrat et partir. Pour le moment, je cherche juste un lieu d'intérêt. Mais en ce moment, rien ne m'attire. Rien ne me va, je n'ai envie de rien. Enfin presque...

« Crac... »

Une branche cassée. Un animal ? Mes pensées s'évaporent d'un coup, je ferme les yeux et me concentre sur l'ouïe. « Crac... » Non, deux jambes. « Crac... » Qui s'éloignent du camp ? Si c'est pour pisser, ça fait un peu loin... Mais rien d'alarmant en somme. Je dois juste penser à guetter le retour de cette personne, ou bien chercher le mercenaire manquant au camp une fois mon tour de garde terminé. À ce propos...

« Crac... »

Cette fois, ça vient de derrière, je me retourne. C'est Xarès qui s'étire en baillant. Je lui laisse ma place, il s'y laisse tomber mollement. « J'ai entendu quelqu'un s'éloigner. Je vais juste voir de qui il s'agit » Il me répond d'un hochement de tête. Même pas sûr qu'il fasse attention à ce que je lui dis... Qu'importe, je descends en direction des pas de tout à l'heure, vers la cascade. Ah, la curiosité...

À travers le brouhaha de l'eau, j'entends l'eau clapoter derrière les arbres. Je m'arrête soudainement. Quelqu'un qui se baigne ? Saloperie de curiosité, elle me mènera à ma perte...

Diable... Mon cœur va s'arrêter. C'est elle. Je m'accroupis derrière un arbre couché, mon abdomen chauffe, mon corps se ramolli. Quant à mon cœur... Malgré le coup qu'il vient de prendre, il est là et il fonctionne, je ne peux pas en être plus certain qu'en ce moment. Elle ne semble pas m'avoir aperçu. Je n'arrive pas à détacher mon regard de la beauté de son corps, baigné jusqu'en haut des cuisses.

Les rayons argentés de la lune exhibent ses formes intimes, sa peau pâle et lisse... Elle a une cicatrice sur le bras droit, et une autre en biais sur la hanche gauche qui descend vers son nombril. Ses muscles abdominaux sont fins et taillés, et ses seins libres ruisselants... plus ronds et volumineux qu'on ne l'imagine quand elle porte son plastron. Ses fines mains de guerrière en massent lentement les pointes dans le creux entre le pouce et l'index. Je l'entends soupirer même à travers le bruit de la chute d'eau. Sa tête se penche en arrière, ses longues mèches ondulées mouillées laissent la lumière découvrir son visage, traits détendus, paupières closes.

J'ai envie d'aller saisir ses hanches saillantes trempées, et de coller ma bouche contre la sienne entrouverte. Elle se caresse sous l'eau, et se masse les seins de l'autre main. Moi, je suis en train de fondre. Mon ventre chauffe encore plus. Mon sexe s'étrangle dans mon pantalon. Mon esprit s'excite, panique, s'excite davantage... J'ai mal. J'ouvre ma ceinture pour me libérer de cette douleur. La boucle cogne la garde de mon épée. Cette fois, mon cœur va vraiment s'arrêter. Ou bien exploser.

Elle me fixe de ses yeux éclatants d'un jaune orangé. Est-ce qu'elle me reconnaît ? La lueur s'intensifie et vire à l'argenté. Elle va me tuer... Elle cache sa poitrine de ses deux bras, et se dirige vers les rochers sur la petite plage qui nous sépare. Je recule, je trébuche, je rampe en arrière. Elle s'arrête soudainement. Ses yeux virent lentement au pourpre. Mon corps s'engourdit. J'ai peur. En cet instant, je sais qu'elle m'a reconnu, et je me déteste de l'aimer... Je voudrais fuir le plus loin possible, mais je sais qu'elle me retrouvera.

Elle fait un premier pas en avant. Je n'attends pas le second, mon corps réagi tout seul et s'échappe en direction du camp. Je ralentis au pas un peu avant Xarès, je tâche de reprendre un air passif. Mon cœur ne veut pas se calmer, tant pis. « Rien à signaler » lui dis-je simplement avant de regagner le camp. Encore somnolent qu'il est, il n'a pas du se rendre compte de grand chose. Je me glisse dans mes couchages sans trop de bruit.



* * *



J'ai passé la nuit à me maudire, à angoisser. L'aube arrive, certains commencent déjà à se lever. Eux aussi, je les maudit. Je redoute cette journée, et toutes celles qui vont suivre. Je déteste déjà les courbatures de ce matin. Et le bouillon trop clair, et le soleil aussi. Je déteste déjà absolument tout. Son regard me gifle, encore et encore. J'ai envie de chialer, de tout casser, de m'éclater le front contre un arbre... Je ne cause à personne, je réponds par grognements. Je sens qu'au moindre mot, je vais trahir ma détresse sentimentale.

J'évite ses regards mauvais qui veulent me transpercer de toute part. Elle n'a qu'à venir me parler directement, à la fin ! Une grande claque me décolle le poumon gauche. Je me retourne avec la mine la plus affreuse que je suis capable d'afficher. Je suis vraiment pas d'humeur. C'est Argo, avec un sourire gêné.

« Désolé, j'y suis allé un peu fort, lieutenant... me dit-il. Tout le monde se demande quel démon t'as avalé. »

Et tout le monde me regarde plus ou moins discrètement. La bulle dans ma gorge disparaît et je m'enflamme. J'aboie des ordres, je contamine la troupe de mon humeur massacrante. Argo a raison. Je suis une vraie raclure, en ce moment. Je ne sais plus quoi faire de moi, je suis paumé... Je décide de me reprendre pour le reste de la journée. Argo est un type bien... C'est peut-être ce qu'il me manque. Du bon sens. Personne n'est responsable de mon cœur froissé. Je dois parler à Naylae, poser les cartes sur la table. Je le ferai ce soir, qu'importe ce que je vais prendre dans le buffet. Je dois penser à la mission.

En milieu de journée, elle ordonne une halte le temps de se restaurer. La routine, si ce n'est ses regards meurtriers... Je m'isole un peu plus loin avec ma part. Mes tripes sont nouées, impossible d'avaler un morceau de sanglier. En temps normal, mon estomac se serait plaint du trop peu.

« Est-ce que je peux faire quelque chose ? » Argo, trop gentil, s'assoit à côté de moi avec son écuelle vide. Je ne trouve rien de constructif à lui répondre, sauf...
« —Tu devrais plutôt être auprès d'Aeline... » Il se tourne vers moi, estomaqué. Moi, j'ai toujours le regard planté dans le fond de ma gamelle.
« —Comment tu... Alors c'est ça ? » Son regard prend la fuite dans les fourrés devant nous. « Je pensais plutôt que...
—C'est pas ça. Et je le sais parce que je vous ai vus, simplement. » Du coin de l'œil, je le vois devenir écarlate. « C'est pas interdit. T'es un type bien, tu devrais pas te soucier de moi. »

Je suis sincère, ce gars a du mérite sur beaucoup de plans. J'ai jamais compris pourquoi il n'était pas lieutenant quand je suis arrivé. Ni pourquoi il ne l'est toujours pas. Il affiche une mine sombre que je n'ai jamais pu observer avant.

« —Ça n'a pas toujours été le cas... D'ailleurs, si tu veux savoir, c'est ton droit. T'es lieut...
—Non, l’interromps-je. Je n'ai rien besoin de savoir de ce que tu préfères garder pour toi. »

C'est lui maintenant qui creuse du regard le fond de son écuelle. Alors même si je parviens un jour à trouver une femme assez tordue pour m'aimer, les blessures de mon esprit resteront, comme lui ?

« —Elle ne sait rien de tout ça, lâche-t-il avec l'angoisse sur le visage. Elle me connaît à peine... Je suis un vrai débile de pas lui avoir parlé de tout ça avant...
—Elle aime ce que tu es aujourd'hui, dis-je simplement. Si tu as changé, à quoi bon te haïr pour ton passé ? » Je lui rend sa claque de titan en plein sur l'omoplate. « Tu te flagelle bien assez l'esprit toi-même, à cause de cette autre personne que tu as été.
—Tu as peut-être raison, répond-t-il en se frottant le dos avec un sourire grimaçant. Mais est-ce que je dois lui cacher ? Je vois mal comment aborder le sujet.
—Ça, tu me le demandes, à moi... »

On reste muets quelques longues secondes, chacun dans sa peine. C'est lui qui brise le silence morne, et écarte un peu la fissure de mon cœur.

« C'est vrai que ça a pas l'air d'aller fort de votre côté en ce moment. Rien de grave ? »

Son « votre » résonne doux et piquant en même temps dans mon esprit. Et qu'est-ce que je peux bien y répondre, à ça ? Je panique un peu, je cherche des mots, des explications. Mais toutes mènent à la conclusion que je suis gravement amoureux, et que c'est la source de l'orage ambiant dans la troupe. Je suis un connard, et un connard inexpérimenté. Autant l'assumer, au moins un peu...

« Il n'y a rien entre la Capitaine et moi, confie-je honnêtement en m'avouant du même coup de marteau sur le cœur la triste vérité. J'ai cru que... Et j'ai eu tort.
—Hmm... répond Argo en frottant son menton, pensif. Bah pour le coup, t'es pas le seul à avoir cru que...
—Comment ça ? »

La spontanéité de ma curiosité lui étire un sourire narquois remplacé presque aussitôt par un air gêné. Il semble chercher une façon de s'expliquer, puis poursuit :

« C'est à dire que... Quelques jours après ton arrivée, la Capitaine s'est un peut adoucie avec la troupe. Puis il y a eu vos petites excursions le soir... Alors là on s'est dit que c'était sûr. C'était fréquent, et la Capitaine était nettement moins morose, voire même souriante par moments. Nous, on est dans la Compagnie du Crépuscule depuis plusieurs années pour certains. Et ça nous a clairement étonnés, tu peux nous pardonner ça. Avec ça, on ne l'a jamais vue aussi débordante de colère qu'en ce moment. On se demandait ce que tu avais bien pu lui faire comme coup... »

Il se tait alors que je dois sûrement rougir de je ne sais plus trop quelle émotion. Et je dois penser quoi, moi, à la fin ? Cette situation ne peut plus durer. Je vais aller lui parler en rentrant au... « Attaaaaaaaque ! »

Encore ? On se relève en trombe, on sprinte quelques secondes et on s'arrête. Ils sont bien plus nombreux, ce coup-ci. Cent-cinquante à vue d'œil de stratège. On est pas assez, ça va se jouer serré. Je balaie le camp du regard et je trouve Naylae, immobile, le visage crispé dans une réflexion furieuse. Ses yeux oscillent du rouge à l'orange. Argo file vers le front de la troupe. Je le suis, et j'entends notre Capitaine qui commence à aboyer des ordres de formation. Ils peuvent facilement nous encercler, et le terrain forestier en pente rend les choses encore plus délicates. Les chariots rendent la fuite impossible. Et avec l'humiliante déculottée qu'on leur a infligée quelques jours avant, ils ne vont pas y aller du plat de la lame...

Aeline appelle Argo un peu derrière. Ils se retrouvent et fusionnent quelques secondes du regard. Voilà ce qu'il était venu chercher devant. Je me reprends. Je suis lieutenant, par le Diable. Je m'anime naturellement, je beugle et fais suivre les instructions. Je place nos mercenaires les plus robustes au centre du mur de bouclier, les plus agiles juste à côté. Les troglodytes vont sûrement tenter de nous percer au centre. On doit leur donner du mal, les fatiguer, et les accueillir dans le sang une fois qu'ils auront passé notre défense. Sur les flancs, je place moins de boucliers, mais tous nos archers afin de leur passer l'envie de nous encercler. Enfin, espérons-le.

Je souffle un coup une fois tout le monde en place. Je croise le regard éclatant d'argent de Naylae et je file au front. En face, ça beugle, ça rugit, ça intimide. Le stress se répand dans la troupe. Je prends une bonne inspiration. Il est temps de motiver tout le monde :

« La dernière fois, ils étaient aussi nombreux que nous, et ils nous ont à peine esquintés ! On les a piétinés comme des rats sans même être préparés ! Alors cette fois, ils reviennent à égalité ! Enfin, ça, c'est ce qu'ils pensent ! Montrons-leur qu'ils ont tort ! Nous sommes la Compagnie du Crépuscule, et notre Nuit n'est pas encore arrivée ! Souvenez-vous de ce vous avez déjà connu ! Ils vont se briser les os contre nous ! »

D'ici, nos hurlements sauvages semblent surcharger ceux de nos ennemis. Le moral est à bloc. Face à cet affront, les troglodytes se regroupent et chargent vers nous. Les visières des casques se rabattent en claquant les unes après les autres. En dernière minute, je fais ajouter du renfort vers le point de collision estimée.

« On doit tenir le choc ! »

L'impact est violent, le mur manque de se rompre mais on le referme à coups de hargne et de piques. On en blesse une dizaine qui restent coincés entre leurs alliés et nos boucliers. Ils ne relâchent pas la pression, certains essaient d'escalader nos défenses mais ceux qui y parviennent, blessés, se font achever rapidement. Le mur recule, j'ordonne de pousser mais ils sont trop surchargés. Sur les flancs, de petits groupes dispersés se faufilent tant bien que mal entre nos flèches.

Je me tourne vers Naylae, c'est plus l'heure de se faire du mal. De ses mains, elle me décrit le signe que j'attendais. Je gueule aussitôt en désignant un point de rupture. On va faire entrer une dizaine d'ennemis, puis se refermer aussitôt. Argo, Naylae, Aeline, Xarès et moi, on s'en chargera avec cinq autres aguerris. Et on va répéter la manœuvre autant de fois que possible. On doit dégrossir leurs effectifs.

Je hurle le signal. Le petit couloir de boucliers se forme rapidement. Les défenseurs ont du mal à retenir la horde qui s'engouffre. Presque dix ennemis de plus que prévu entrent avant que le mur ne se referme. On les encercle comme on peut. Argo et Aeline forment un duo sanguinaire impressionnant. Ils sont complémentaires au combat, et leurs ouvertures sont rares. Ils ont abattu la moitié du travail à eux seuls. Les trois que j'ai affrontés n'étaient pas très habiles, j'en suis presque vexé. Naylae en a abattus quatre dans une fougue colérique effrayante. Xarès termine de retirer sa lance de la poitrine des deux qu'il a fauchés d'un coup. Les autres, n'ayant pas eu le temps de participer, nous dévisagent, béas.

Une seconde salve d'ennemis pénètre dans le piège. Le mur recule moins vite, la fougue des assaillants s'essouffle. J'en occis un, deux, trois. Le quatrième est plutôt agile, il a dévié deux de mes bottes. Il tente de me percuter la face de la tranche de son bouclier, j'esquive d'un rapide pas de côté et intercepte la lame de son épée à dix centimètres de mon épaule. Je le repousse d'un solide coup de pied à la hanche, puis dégaine un couteau de lancer qu'il pare d'un revers de bouclier avant de relancer un attaque latérale. Un léger bond en arrière, juste le nécessaire, et je dévie sa tranche vers le bas au dernier moment. Déséquilibré, il m'offre sa tête. Je m'approche d'un pas et lui sépare de son corps d'un leste mouvement.

Derrière moi, j'entends le sifflement d'une lame, puis un gémissement. Du sang chaud éclabousse ma nuque, un corps heurte lourdement le sol. Je frissonne, puis me retourne. Naylae me regarde, son sabre ruisselant du même éclat que ses yeux inquiets. Et voilà, je lui en dois une, maintenant. Je la remercie d'un mouvement de tête, un peu amer malgré moi.

On parvient à abattre une troisième vague, et presque une quatrième avant que plusieurs groupes d'ennemis parviennent à nous encercler. Nos archers sont déjà à court de flèches, et ils sont encore à peine plus nombreux que nous. Les défenseurs sont épuisés, mais à même titre que leurs assaillants. Nos pertes sont très légères à première vue. Les leurs vont leur causer des remords. Mais sûrement d'abord les enrager...

On achève les derniers troglodytes piégés, puis Naylae donne l'ordre de se resserrer et d'ajuster la formation de façon circulaire. Pas idiot, sans être une assurance non plus. Mais moi-même, je ne vois pas autre chose à faire pour survivre dans l'immédiat. La compagnie n'a même pas le temps de réagir. Le milieu du mur s'écarte, nos guerriers se dispersent. Les groupes qui nous ont encerclés lancent leur assaut au même instant. La bataille se mue en une mêlée chaotique. Je ramasse le bouclier de mon dernier opposant et jette regard circulaire rapide. Naylae a disparu du secteur...

Argo et Aeline se font assaillir de tous les côtés, tenant bon de peu. Je les rejoins rapidement, abattant ma lame dans le dos de deux troglodytes qui tentent de les prendre à revers. Pas le temps de me sentir lâche. Les amants mortels ne portent aucune blessure grave apparente. J'ai déjà combattu aux côtés d'Argo pas mal de fois, d'où l'intense respect qu'il m'inspire. Aeline est d'une vivacité époustouflante, et sait faire preuve d'une inventivité meurtrière expéditive. À trois, on repousse sans difficulté ceux qui nous tombent dessus. On se synchronise quasi-naturellement, on s'entraide et se protège sans entraver nos mouvements. Ça se calme un peu de notre côté. Xarès nous rejoint, légèrement blessé au flanc. Il se défend comme un tigre, celui-là aussi. Je profite du moment : « Vous avez vu la Capitaine ? »

Ils me répondent en secouant la tête. Xarès pointe soudainement son index en direction des carrioles. « Là-bas ! » Je me retourne. Ils sont trop nombreux autour d'elle, je crois qu'elle saigne à l'épaule gauche. Je m'emballe aussitôt : « ON FONCE ! »

Ils y mettent le même entrain que moi. Je hurle pour la troupe : « ON LES DÉCIME JUSQU'AU DERNIEEEEEEER !!! » et autres barbaries. On se taille un chemin dans la chair, on fait jaillir des gerbes de sang, on fracasse l'acier, on broie les os. Je les brutalise avec une fureur que j'ai rarement ressentie. Certains ennemis s'écartent de trouille en nous laissant passer. J’aperçois les corps de certains d'entre nous, je me déchaîne encore plus fort. « Attention à gauche ! » crie Aeline. Un groupe d'une vingtaine nous charge. Je jette un œil à Naylae qui esquive les assauts sans plus savoir riposter.

« Vas la rejoindre ! me crie Argo. On va les retenir ! »

Ce type, vraiment...

« Restez en vie ! lui dis-je empli de reconnaissance. »

Je sprinte, je passe entre les ennemis que je peux contourner, j'en massacre brutalement un qui ose s'interposer entre elle et moi. Puis un second. Un troisième se fige sur place en apercevant l'expression monstrueuse que je dois afficher. Encore une dizaine de mètres... Naylae se retrouve le dos plaqué contre un arbre, hors de mon champ de vision. J'ai l'impression que mes cuisses se consument sous l'effort tant j'accélère encore.

Le troglodyte qui dépasse à droite de l'arbre me voit arriver, trop tard. Je le heurte si violemment pour amortir ma course qu'il en laisse échapper sa hache de bataille en valdinguant sur le dos. Aussitôt, je lâche mon bouclier, m'empare d'une dague derrière mon dos et la plante juste sous l'aisselle de celui qui étrangle mon aimée contre le tronc. Elle retombe sur ses genoux et saisit son sabre au sol. J'envoie deux couteaux se planter dans la cage thoracique de celui qui lève son épée sur elle. Elle se relève et se positionne à ma gauche en reprenant sa respiration.

Ils sont neuf face à nous. Celui que j'ai envoyé valser juste avant s'avance prestement vers moi. J'avorte son initiative d'une feinte menaçante, il tombe dans le piège, se crispe en se mettant en garde soudainement, sans voir mon dernier couteau de lancer venir se caler dans son front dans un bruit sinistre. Il convulse une minute au sol, les autres troglodytes s'échangent quelques regards. Naylae et moi aussi. Elle a reprit son souffle.

Quatre s'avancent avec un air aussi menaçant que possible. Les autres les suivent un peu en retrait. Moi, je montre les dents comme un chien enragé. Celui à ma gauche serre sa hache d'arme et tente un coup de de biais sans assez d'assurance, trop lent. Je dévie son arme de façon à ce qu'elle se plante dans l'arbre derrière moi, juste avant de brutalement lui enfoncer mon poing ganté au milieu du visage. Il lâche un grognement gémissant et recule de deux pas en se tenant le nez. Je me déplace aussitôt d'un pas sur la droite en pivotant pour éviter la lance courte du second. Je tranche sa cuisse, son flanc, puis son cou. Un autre arrive en renfort du premier qui revient si rouge de colère qu'on distingue à peine le sang sur son visage.

J'aperçois du coin de l'œil mon binôme qui déchaîne sa hargne vengeresse sur les trois qu'il lui reste. Ils paniquent, se défendent avec grande difficulté contre le sabre de notre Capitaine, ne parviennent plus à attaquer. Inspiré, je me laisse prendre dans ses émotions. En quelques mouvements bien réfléchis, je calme mes deux assaillants d'une maîtrise qui pousse le dernier à se joindre à la lutte mortelle. Ils me surchargent d'attaques hasardeuses, je me protège comme je peux. Ils m'entaillent deux fois à chaque bras, rien de grave mais ils prennent de l'assurance.

L'énervé, à ma droite, tente de m'éclater le cou d'un revers de hache horizontal un peu trop enthousiaste. Je recule lestement au dernier moment, il manque de toucher son allié à sa droite. C'est sans compter sur ma souplesse. D'un coup de pied haut contre la tête de hache, j'en enfonce le tranchant dans la trachée du malchanceux qui tombe à genoux en se tenant la gorge. Choqué de son erreur, celui au nez brisé par mes phalanges me laisse le temps de lui rendre son coup, de façon bien plus efficace. Son corps reste debout quelques secondes, sa tête disparaît dans un buisson plus loin.

Le dernier tente d'enchaîner les attaques comme une furie, puéril et désespéré. Je dévie tout sans difficulté, j'en profite pour garder un œil sur mon aimée, qui occis son dernier adversaire dans une nuée écarlate. Je laisse le mien se s'épuiser en à peine une minute, puis je lui fend la cage thoracique. Il jaillit toute sa vie par les poumons, puis s'écroule lourdement sur le dos. Cette fois, j'ai été aussi impressionnant qu'elle.

De nouveaux adversaires arrivent par nos deux flancs, leur enthousiasme s’essouffle lorsqu'ils aperçoivent notre carnage. Ils nous prennent immédiatement au sérieux et nous encerclent. Deux contre treize. Mon niveau d'adrénaline est à son maximum. On se poste dos à dos, à trois mètres d'écart. Ils attendent. Cinq autres les rejoignent. Enfin, ils fondent sur nous.

J'esquive et je dévie trois tentatives d'affilée. Je me faufile entre les coups. Je n'ai plus peur, je dois la protéger. Mon corps se détend, mes muscles se contractent juste le nécessaire pour me mouvoir et me défendre efficacement, je ne bloque pas ma respiration, je m'oxygène efficacement. Je pivote pour laisser me frôler une masse hérissée de pointes rouillées tenue par un colosse barbu. D'un simple changement de garde tout en reculant d'un autre pivot, je caresse sa carotide du fil de ma lame. Il se fige, ouvre la bouche, blêmit. Quatre saccades pourpres ont le temps de jaillir dans les fourrés avant qu'il ne se mette à hurler et gesticuler dans tous les sens en écrasant sa blessure d'une main.

Profitant de l'écart creusé entre mes adversaires et moi, je me retourne et fauche au passage d'un revers d'épée traître le flanc du troglodyte que vient juste de repousser mon aimée qui se défend avec une fluidité extraordinaire. Je reviens sur mes adversaires qui ont maîtrisé le gros barbu. Deux approchent rapidement, je les agresse violemment sitôt qu'ils arrivent à ma portée. Tout en restant souple et fluide, je tire sur tous les nerfs de mon corps à chaque mouvement, ils peinent à se protéger. Deux autres les rejoignent aussitôt, je redouble d'efforts, le cerveau bouillonnant. J'écoute minutieusement ce qu'il se passe derrière moi, et je concentre le reste de mon attention devant. Je n'ai pas le droit à l'erreur.

J'attaque sans relâche, je les déstabilise, leur laisse à peine le temps de rétablir leur équilibre. Je grogne dans l'effort et j'accélère encore, ils reculent. Mes muscles brûlent. Je taille le haut d'une oreille, je sectionne un avant-bras, je tranche une cuisse jusqu'à l'os, je fend un visage en deux. Ceux qui tombent sont aussitôt remplacés. Celui à l'oreille coupée tremble, hésite. Les arrivants attaquent hargneusement. J'esquive, je pare, je feinte un coup horizontal, ils reculent tous. Je leur sers le sourire le plus mauvais et sadique que je suis capable d'afficher sur ma gueule balafrée, puis je rugis comme la bête sauvage que j'ai dans les tripes. Naylae me renvoie un hurlement féroce.

Je jette un coup d'œil par dessus mon épaule. Nos regards se croisent, imprégnés d'une furie meurtrière. Ses quatre derniers adversaires ont aussi pris quelques distances. Sur les cinq qu'il me reste, celui dont j'ai taillé l'oreille prend ses jambes à son cou en trébuchant. Les quatre autres le foudroient du regard. Ils se regardent ensuite, s'enhardissent puis me toisent en prenant leurs airs féroces. Je leur rend un sourire insolent et me remet en garde. Ils se jettent sur moi, se battent de toutes leurs forces. J'esquive, je dévie, je nargue, je les pousse à s'emporter, m'interdisant la moindre erreur. Derrière moi, le fracas des lames reprend aussi.

J'attends que celui tout à gauche se laisse enfin un peu trop enthousiasmer dans un coup de hache colérique sous lequel je me faufile lestement. Je taille juste au dessus de son genou droit à ma portée, puis je le contourne du même côté immédiatement, me mettant hors d'atteinte de ses comparses. Il a juste le temps de réagir à mon déplacement en pivotant, mais pas celui de prendre en compte, dans sa manœuvre précipitée, sa blessure fraîchement acquise. Son genou fléchit irrémédiablement. Avant que ce dernier ne touche le sol, ma lame s'enfonce verticalement dans son crâne chauve.

Je repousse d'un solide coup pied le malheureux en lui arrachant mon épée du cerveau. Les gerbes de sang aspergent les yeux celui qui le réceptionne maladroitement et impressionnent les deux autres. Ils se jettent néanmoins tous les deux sur moi pendant que l'aveuglé s'essuie le visage en grognant plus de trouille et de dégoût que de rage. Ils frappent simultanément, je dévie d'un seul geste l'épée et le claymore, je me faufile entre eux comme un chat et j'enfonce mon épée sous le sternum de celui resté en retrait et toujours incapacité, je traverse son cœur et ressors par son omoplate. J'extirpe ma lame de sa chair, le laissant tomber sur ses genoux. Dans un dernier spasme, il crache deux fois dans l'herbe le sang qui envahit ses poumons, puis s'écroule mollement.

Naylae malmène ses adversaires avec une prestance redoutable et indisciplinée. Elle détourne adroitement un coup de lance porté vers son abdomen, écrase d'un coup de genoux les parties faibles du troglodyte déséquilibré, et enchaîne sans attendre sur les trois autres restants. Cette femme est incroyable...

Mes assaillants hésitent, gardent une distance de sécurité en essayant de me prendre par deux côtés. Je recule, je reprends mon souffle, mes poumons sont en feu. Je dévie quelques coups, je les laisse reprendre de l'assurance en gardant un œil sur ma guerrière qui semble tempérer son rythme aussi. Elle jette des regards circulaires sur le champ de bataille, j'en fais de même sans me déconcentrer du combat. Les troglodytes semblent être mis en déroute. On verra plus tard à quel prix on aura gagné cette bataille...

Je remets de l'entrain dans mes mouvements, il est temps d'en finir. Je dévie un revers de claymore que je repousse du pied en fin de frappe, afin de pouvoir abattre ma lame sur l'une des mains de son bretteur. Un doigt et demi de sectionné, il serre les dents et gémit de douleur en reculant mais ne lâche pas son arme. Son binôme tente de se glisser sur ma droite. Son épée vise mon flanc, prévisible. Je le laisse me frôler en pivotant, j’atteins son épaule en éclatant sa cotte de mailles puis enfonce mon épée entièrement sous son aisselle démunie de protection.

J'ai senti l'air se mouvoir contre ma nuque lorsque le dernier a levé sa grande lame dans mon dos. Je ne relâche jamais mon attention après avoir vaincu. J'abandonne mon arme dans le thorax de feu son dernier allié, et je bondis en arrière en me retournant pour le surprendre et sortir de la portée optimale de son arme imposante. En même temps, je sors ma dernière dague de son fourreau et lui range entre les dents. Sa mâchoire se referme en claquant sur ma lame dans une ultime convulsion, son long et dernier soupir en embue l'acier, emportant avec lui son désir de vaincre. Puis son regard s'éteint.

La Capitaine se bat encore contre deux troglodytes. Je n'ai pas le temps d'intervenir, elle tranche le poignet puis décapite à moitié l'un d'eux, puis déferle du fil de son sabre sur le dernier. Il parvient à se défendre jusqu'au quinzième coup qui lui traverse la gorge d'une estocade nette et précise.

Elle se tourne vers moi. On se regarde quelques longues secondes. Je n'arrive pas à déchiffrer son expression. Elle porte une légère blessure à l'épaule et une entaille peu profonde à la hanche. On balaie du regard le champ de bataille. Les pertes sont lourdes. Au moins une vingtaine de nos guerriers gisent au sol. J’aperçois Argo blessé au flanc qui nous fait des signes d'un bras en boitant vers nous. Il a l'air encore vigoureux, Aeline le soutient par son autre bras et a n'a pas l'air d'être gravement blessée non plus. Xarès est un peu plus loin, sauf lui aussi. Comme à son habitude, il soigne les blessés et donne les directives médicales aux autres mercenaires valides.

Naylae se remet à donner des instructions. J'espère qu'elle me pardonnera.



* * *



L'étendard de la victoire n'est qu'un vieux drap sale éclaboussé de sang. À la guerre, personne ne gagne. Même ceux qui survivent y laissent quelque chose. Et si on pense ne rien y avoir perdu, alors c'est qu'on y a laissé son âme.

J'observe l'aiguille courbée entrer sous ma peau et en ressortir, je sens le fil glisser dans ma chair. C'est une sensation bien moins désagréable et mille fois plus habituelle que l'angoisse qui me ronge les tripes en ce moment. À côté de la tristesse de la perte de dix-huit de nos guerriers, plus quatre dans un état encore incertain, il y a cet amour brûlant qui me consume le cœur. Sale période...

Xarès est un excellent toubib de terrain, mais il panse en cet instant des blessures bien superficielles à côté de ce tout ce qui saigne dans l'intangible intérieur de mon esprit. Il noue les bandages puis se lave les mains dans une bassine d'eau brunâtre de sang, avant de s'écrouler sur une chaise, exténué de cette journée infernale. Pas très bavard, mais un exemple de courage, ce type. Je me rhabille, le remercie d'un hochement de tête qu'il me rend, puis je sors de la tente.

Argo et Aeline se restaurent avec les autres autour d'un des feux. Je les rejoint, Argo me tend mon écuelle qu'il a du récupérer avec la sienne. La faim me tenaille l'estomac. Je m'empare du morceau de gibier fumant aux champignons forestiers, avant de mordre à pleines dents dans la chair juteuse.

« —On s'en est bien sortis malgré tout, adresse-t-il à ma mine piteuse en essayant un sourire peu convaincant.
—Hmm... »

Je termine de me goinfrer sans un mot, puis je cherche Naylae du regard.

« —Elle est partie vers la falaise au sud il y a peu, me dit Aeline avec empathie. »

Je les remercie, puis je m'éloigne du camp. Il reste environ deux heures avant que le crépuscule ne vienne obscurcir le ciel de cette sombre journée. J'arrive au ruisseau, deux autres guerriers sont en train de se sécher un peu plus haut. Je me dénude et m'immerge jusqu'à la taille dans l'eau claire et fraîche. Je prends le temps de me laver avec précaution pour ne pas trop mouiller mes bandages. Les courbatures et contusions y participent un peu aussi. Je soigne mon corps, je flagelle mon esprit.

La luminosité commence à baisser. Je me sèche avec une serviette rêche, je me rhabille et me dirige vers la falaise au Sud. Dès mon premier pas, mon cœur se remet à cogner frénétiquement contre mon thorax. Je ne sais même pas si je souhaite qu'elle y soit encore ou non. Et quand j’aperçois sa silhouette recroquevillée dos à moi, face au coucher du soleil, j'en frissonne. Combien de jours se sont écoulés depuis la dernière fois ? J'hésite à faire demi-tour tant qu'elle ne m'a pas entendu.

Trop tard. Son buste se tourne vers moi. Ses yeux étincellent du mauve au pourpre, je serai toujours fasciné par ce regard que je sens comme un couverture chaude invisible qu'elle plaque contre mon corps. Elle me regarde quelques longues secondes, puis tapote deux fois le sol à côté d'elle en détournant son regard vers l'horizon. Silencieux, je viens me poser là où elle m'y a invité. Elle ne porte pas ses épaulières, sûrement trop abîmées par le coup qu'elle a reçu à son épaule. Elle n'a pas l'air d'en souffrir.

Elle pose sa joue contre mon épaule, reste muette. Son odeur embrume mon esprit, m'apaise doucement. Je reste à ses côtés sans rien faire d'autre que profiter de sa présence. Le moindre de ses petits mouvement me fait un petit quelque chose que je ne saurais expliquer. Juste, j'aime la sentir se mouvoir contre moi, même rien qu'un peu. Je sens tout d'elle. La vue du soleil couchant derrière les pics rocheux est divine, mais la moindre de mes attentions lui appartient. Elle me réchauffe, elle m'éblouit et me fascine. Elle est mon horizon, mon soleil...

Je passe un bras autour de sa taille, prenant garde à ne pas la brusquer, elle ne dit rien. La bataille nous a sévèrement calmés. Je décide de tâter son esprit :

« Comment vont tes blessures ?
—Des égratignures, me répond-elle. Et toi ?
—Quelles blessures ? »

Elle sourit tristement, le regard perdu dans la forêt une centaine de mètres plus bas. Elle parle presque à voix basse :

« Oui... On s'en est bien sortis, nous... »

Je l'encercle d'un bras et la serre tendrement contre moi. Elle vient poser sa tête dans le creux de mon épaule, puis une main sur mon ventre. On se laisse aller contre le sol. Je caresse doucement ses longues mèches blondes, j'essaie de l'apaiser, et de m'apaiser moi-même. Mon cœur bat à vive allure, elle doit l'entendre et le sentir frapper ma poitrine.

« Ce n'est pas ta faute, lui dis-je doucement. Tu as fait de ton mieux.
—Ce n'était pas suffisant, répond-elle un peu froidement.
—Personne n'aurait fait mieux, la contredis-je. Ils étaient trois fois plus nombreux. Sans toi, on y serait tous passés. »

Elle se contente d'un « Hmm... » dubitatif. Je la serre un peu plus contre moi.

« Pour ma part, si je dois mourir pour toi, je n'aurais que peu de regrets. »

À ma confidence, elle se relève au dessus de moi et me darde le visage de son regard bleu foncé, puis violet, puis rouge, puis jaune... Sa mine se renfrogne et elle abat fermement son poing sur mon abdomen.

« Je ne te pardonnerai jamais de mourir pour moi, lâche-t-elle sur un ton presque menaçant. »

Je reste stupéfié quelques secondes. Si j'étais moi aussi l'enfant d'une Valkyrie, mes yeux seraient aussi en train de changer de couleur à toute allure, avant de s'arrêter au vert pâle. Je n'ai aperçu qu'une seule fois cette lueur de peur dans son regard, un très court instant. Là, c'est la colère orange qui scintille et me scrute...

« Je... parviens-je à balbutier. Je ne compte pas mourir de sitôt. »

Elle me dévisage quelques longues secondes encore de ses iris jaunâtres aux pupilles abyssales contractées de colère. Puis elle finit par se relâcher et se laisser de nouveau aller contre moi, m'enlaçant d'un bras. Je replonge ma main dans sa soyeuse chevelure. Mon cœur va exploser, je dois dépressuriser mon esprit.

Quelques longues minutes passent dans le silence. Nos regards ne se croisent plus. Je la sens parfois prendre de longues inspirations, qu'elle relâche en silence quelques secondes après. Je me demande ce qu'elle a envie de me dire. Elle rempli de nouveau ses poumons et parvient cette fois à retrouver sa voix :

« Yorek ? fait-elle toujours sans me regarder. »

Il est rare qu'elle m'appelle autrement que par mon grade depuis qu'elle me l'a donné. Je lui répond d'un « Hmm ? » en émergeant de mes songes.

« Qu'est-ce que tu regretterais ? me demande-t-elle. »

Quelle question ! Il n'y a aucun doute en moi sur ce que je ressens. Avec tout ma certitude et mon cœur palpitant comme témoin, je lui réponds à mi-voix :

« De ne plus pouvoir passer ces soirées avec toi. »

Cette fois, son regard vient traverser le mien, redevenu pourpre. Elle reste quelques instants à me sonder, je reste suspendu à ses yeux plissés.

« Seulement ça ? lâche-t-elle enfin.
—Non... »

J'ai soupiré ce dernier mot sans détacher mon regard du sien, qui commence à se teinter d'un éclat rose foncé que je n'ai jamais vu avant. Elle se redresse de nouveau au dessus de moi. J'en fais de même et nos visages s'approchent. Elle me dévisage encore, mais d'une autre façon cette fois. Ses yeux s'attardent sur mes lèvres, ses joues prennent de légères couleurs. Je n'en peux plus de cette situation absurde.

J'approche mon visage et je saisis ses lèvres entre les miennes. Elle me repousse contre le sol, m'enjambe, me cale entre ses cuisses, et se penche pour m'offrir un baiser aux lèvres pulpeuses et humides. Nos bouches fusionnent, s'emballent, elle me dévore d'une passion sauvage trop longtemps retenue. Je sens son bassin qui se tortille, frotte son entre-jambes contre le mien qui commence déjà à se gonfler. Sa langue se faufile entre mes lèvres pour venir caresser la mienne. On s'enlace chaudement, sans pudeur.

Nos lèvres se décollent, elle me libère et s'agenouille à côté de moi, me tenant la main. Je la suis instinctivement dans son mouvement. Elle m'embrasse encore, plus doucement, puis elle commence à dénouer les lacets de mes épaulières. J'en fais de même pour son plastron, avec soin, en profitant aussi pour déposer quelques baisers sur la peau douce et chaude du creux de son cou palpitant. Elle penche sa tête en arrière, m'offre sa gorge sur laquelle je déplace aussitôt mes lèvres, pendant que sa protection glisse doucement sur la petite cotte de maille qu'elle porte dessous. Mes épaulières se relâchent avant de tomber sur le sol. Elle sublime mes trapèzes de ses mains aguerries qui se crispent et se relâchent à l'instar de ses soupirs.

J'enlève son plastron, puis le mien. Elle libère aussitôt le haut de mon corps de ce qu'il lui reste, et vient assaillir mon torse de baisers en s’agrippant à mes hanches. Elle descend vers mon abdomen. Je tire vers le haut sa cotte de maille et son chemisier en lin épais, découvrant le creux de ses reins souligné par les ombres projetées par le soleil orange qui s'empale au loin sur les pics rocheux. Elle s'écarte de moi, me laisse faire glisser ses vêtements de son corps, se révèle à mon regard. Elle porte encore une brassière mauve qui retient sa poitrine compressée. Elle étire sur son visage un sourire malicieux.

« C'est mieux de plus près ? me demande-t-elle vicieusement. Mieux qu'à la cascade ? »

Bien plus costaud à encaisser que son coup de poing de tout à l'heure... Je reste bouche bée, sans me retenir de parcourir son corps du regard. Son abdomen entraîné, la courbe élancée de ses hanches, le creux d'ombre entre ces deux derniers, son nombril renfoncé... Elle aura bientôt deux autres cicatrices, sous les pansements sur sa hanche gauche et son épaule droite...

« Tout est mieux plus près de toi, finis-je par murmurer. »

Elle saisit mon visage entre ses mains, m'embrasse fougueusement, arrache ses lèvres aux miennes et me crève les yeux de son regard rose obscur profond.

« Est-ce que tu vas encore t'enfuir, cette fois-ci ? poursuit-elle sur le même ton doux et piquant.
—Non, dis-je fermement avec un regard sincère. »

Je glisse mes doigts dans ses cheveux, derrière sa tête, et je l'embrasse intensément. Je ne saurai pas m'en lasser. Nos langues s'étreignent, mes mains se rejoignent dans son dos. Du bout des doigts, je mesure le creux de ses reins, puis une cicatrice d'une vingtaine de centimètres en biais sous son omoplate gauche. Je parcours ses vertèbres, sa peau est chaude... Ses mains me rendent mes attentions, je la sens explorer mes anciennes blessures, souligner mes muscles, me griffer tendrement le dos...

Je dénoue sa brassière, la laisse tomber au sol. Les tétons durs de sa poitrine chaude et moelleuse viennent immédiatement se plaquer contre mon torse. Notre baiser fusionnel se prolonge alors que mes mains massent tendrement ses seins, jouent avec leurs pointes excitées. Elle s'étend sur le dos en m'emportant avec elle. Sa poitrine rebondit dans ses mouvements, je m'en empare encore en allant dévorer son cou de mes baisers.

Elle frissonne, se cambre, me caresse l'échine en soupirant, tandis que je m'en vais mordiller légèrement ses petits tétons roses foncés, presque mauves. Je les caresses de la langue, les taquines du bout des doigts... Puis je descends encore. Je l'assaille de baisers hasardeux, tourne autour de son nombril de la pointe de la langue, je mords tendrement sa chair. Elle me jette un regard fiévreux, souriante. Je déboutonne et délace ses bottes, elle lève son bassin, j'ôte tout ce qui lui reste de vêtements.

Elle s'expose entièrement à ma vue, me dévore du regard tout autant que moi. J'embrasse ses jambes élancées qu'elle me tend, sur tout leur long. Lorsque mes lèvres arrivent entre ses jambes, elle les écarte et me présente son sexe aux lèvres gonflées et humides, surmontée d'une courte toison blonde soyeuse. Sans savoir me retenir, je colle ma bouche contre cette fente appétissante. J'aspire ses lèvres, les mordille, passe ma langue entre elles... Naylae se crispe, je sens la paume de sa main claquer contre mon front en me repoussant brutalement.

« Doucement ! grogne-t-elle. »

Je me lynche mentalement pour ma maladresse, ma fougue et mon inexpérience. J'embrasse amoureusement le creux de ses cuisses, puis réessaie ma caresse buccale en tâtonnant du bout de la langue, je découvre son orifice, je redessine le contour intérieur de ses lèvres, et je trouve ce petit bouton de chair plus ferme et plus sensible. « Doucement... » me murmure-t-elle alors que je le frôle avec précaution. J'en fais le tour en le touchant à peine, je passe par dessus légèrement après avoir humidifié ma langue. Elle se cambre et prend de profondes inspirations qu'elle relâche en souriant. Elle pose une main derrière ma tête, me guide doucement.

Je lape légèrement l'intérieur de ses lèvres, je peins des signes imaginaires minuscules sur son petit plaisir frétillant. « Oui... Comme ça... Oooooh... » Sa voix et son regard me font rougir, elle bouge de plus en plus son bassin en massant la pointe de ses seins. Je reste quelques longues minutes ainsi sans me lasser de déguster son plaisir, à l'aspirer doucement, le malaxer tendrement entre mes lèvres... Sa respiration s'accélère davantage lorsque j'ose insérer l'index dans son orifice chaud et trempé.

Je palpe sa chair tendre et élastique, j'en explore tous les recoins. Ses réactions m'excitent, j'ai le sexe qui palpite et s'étrangle désespérément dans mon pantalon. Je ne la relâche pas, elle commence à gémir agréablement, me serre parfois entre ses cuisses. Remarquant qu'elle se fait plus expressive lorsque mon doigt s'attarde sur la paroi haute de son intérieur, non loin de son entrée, je décide de m'y concentrer. Je déforme et caresse sa chair d'un côté, je l'aspire et la lèche de l'autre. Elle se contracte de plus en plus spasmodiquement, me plante presque ses ongles dans le cuir chevelu.

« Haaaa... Haaaaaaaaan... T'arrête pas ! »

Je n'y compte pas, mais il est bon de me sentir guidé. Malgré ça, je commence à me sentir fier et habile, je prends confiance en moi. J'intensifie progressivement la caresse de ma langue, j'écarte doucement sa chair glissante du majeur qui vient rejoindre l'index. Elle pousse avec l'arrière de ses cuisses sur mes épaules, son bassin se décolle du sol. Je la maintiens de mon bras libre, j'embrasse son sexe comme un affamé, je la fouille sans relâche. Elle crie, ses ongles me griffent la nuque et les épaules, son corps tremble et m'étreint le crâne entre ses cuisses puissantes.

Elle finit par poser une main sur mon front et me repousse doucement. Je la regarde, perplexe. Elle recroqueville ses jambes en me souriant. L'iris de ses yeux humides brillent d'un rose fushia. Elle se jette contre mon corps, l'étreint en déposant des baisers sur mes épaules, dans le creux de mon cou. Sa respiration chaude sur ma peau me fait frissonner.

Elle m'embrasse, émue comme jamais je ne l'ai vue avant. Ses regards chérissent ma personne, je partage ses émotions dans une transe irréelle. Je sens ses mains se promener en bas de mon ventre, la boucle de ma ceinture claque, je la sens glisser autour de ma taille. Naylae la jette plus loin et délivre mon sexe gonflé qui se tend vers elle, enfin à l'air libre. Elle le regarde avec un sourire satisfait, le soupèse, referme sa main dessus, le palpe, le caresse sur ton son long. Ses lèvres descendent dans mon cou, expirent chaudement contre moi. Elle m'enivre d'elle, descend encore sur mon torse, me mordille parfois la peau, me caresse doucement la verge...

Sa bouche arrive devant mon sexe, elle passe sa langue sur ses lèvres, puis à la base de ma queue. Elle remonte jusqu'en haut, puis recommence avant d'engloutir mon gland gonflé à bloc. Ses lèvres coulissent doucement, ses dents frôlent le long de ma chair, je ne peux empêcher quelques râles de s'enfuir de ma gorge. Je caresse ses joues du bout des doigts, les perd dans ses cheveux aussi fluides que les sables du désert dont ils portent la couleur. Je masse tendrement ses épaules en prenant garde à sa blessure, puis sa fine nuque...

Je glisse mes doigts sous son menton, relève son visage. Mon sexe glisse d'entre ses lèvres, elle me regarde avec de grands yeux embués d'excitation. On s'embrasse encore, puis je fléchis les genoux et glisse mes mains sous ses cuisses pour venir attraper fermement ses fesses sans prendre le risque de lui faire mal à la hanche. Désireuse, souple et aventureuse, elle s'agrippe à ma nuque et passe ses jambes sur mes épaules avec une facilité incroyable.

Je la maintiens et la ramène à moi, sur moi. Je tâtonne à la recherche de son orifice, je me glisse entre ses lèvres quelques instants avant de parvenir à lentement pénétrer son intimité chaude, soyeuse, trempée. Elle descend doucement sur moi en haletant. Elle pénètre mon regard du sien, affamé, sa bouche s'ouvre à mesure que j'écarte sa chair glissante.

Je sens son intérieur élastique me résister légèrement en me laissant me glisser dans son corps. Nos bassins se collent, je reste quelques secondes entièrement en elle, je la sens se rétracter autour de ma verge, me sertir en elle, me relâcher... Je la porte encore, mon sexe coulisse vers l'extérieur, puis je la laisse revenir se coller à moi. Elle gémit chaque fois que j'arrive au fond d'elle, me dévore du regard. J'accélère progressivement, jusqu'à la lever pour la laisser s'empaler sur moi avec un enthousiasme qu'elle relâche dans des soupirs bruyants de plaisir. Elle se cramponne à ma nuque, je lui donne mes efforts jusqu'à ce que les muscles de mes bras commencent à se rappeler de la bataille précédente...

Têtu et fougueux, je me redresse sur mes genoux et je poursuis notre fusion en donnant du bassin. Elle ne se relâche pas non plus et s'acharne à se culbuter contre moi dans des coups de reins qui gagnent en férocité. Elle se cramponne à moi, je m'enfonce jusqu'à ce que ses fesses claquent contre ma peau. Je la pénètre et imprime la forme de mon sexe jusqu'à la moindre de ses nervure dans sa chair glissante. Elle me crie presque au visage de ne pas m'arrêter maintenant, d'une voix saccadée et suppliante. Je me déchaîne sauvagement dans son corps, j'intensifie le rythme, sa voix éclate à chaque coup de bassin que je lui met.

« —YO... YOREEEEEK !!! »

Elle vide ses poumons, on lutte pour notre plaisir commun. Son visage est crispé dans sa transe, elle jouit à gorge déployée. Je sens toujours d'entre ses paupières plissées son regard qui alimente mon feu intérieur. Je la maintiens dans son extase, elle se contracte, serre mon cou de ses mains. Son expression est avide d'un plaisir furieux, je la baise encore avec acharnement, ses mains me lâchent et son corps se cambre. Elle s'appuie au sol sur ses coudes, je poursuis ma saillie passionnée, son visage se déforme de plaisir, elle hurle encore. Je la sens mouiller de plus belle contre moi...

Je m'épuise, mon corps n'en peut plus. Je la repose doucement en m'en vais m'étendre contre elle. Je sens battre son cœur en canon du mien à travers nos peaux en sueur. Ses doigts glissent sur ma nuque, sur mes épaules, mes baisers s'éparpillent dans son cou, je la respire enfin. Je me redresse, me plonge dans son regard rose intense, elle me tire à ses lèvres et m'embrasse tendrement. On s'offre un instant de douceur charnelle fusionnel. Je bouge lentement en elle, en profitant de la douceur de ses seins pointus contre mon torse. Elle caresse mon corps partout où elle le peut, remuant mielleusement son bassin. On échange nos soupirs à travers notre baiser. Nos langues s'emmêlent, nos cœurs s'emballent de nouveau à vive allure.

Je la lâche des lèvres sans la lâcher du regard en me redressant. Je m'absente de son bas ventre également et bascule une de ses jambes devant moi. Elle se laisse faire et pivote sur le flanc en se mordillant la lèvre inférieure, puis recroqueville ses jambes lorsque je glisse mon gambison roulé sous son bassin pour rectifier sa hauteur. Je m'insère aussitôt entre ses lèvres luisantes, dans son ventre doux et chaud, à l'instar de ses gémissements qui reprennent doucement. D'une main, je masse ses fesses en m'appuyant parfois dessus, de l'autre, ses seins... Je m'enivre d'elle, je voudrais pouvoir tellement plus la toucher...

Je me perds encore dans son corps, ignorant mes reins endoloris, n'écoutant que sa jouissance revenir progressivement tandis que je regagne en intensité. D'un bras, elle me cramponne la hanche et me tire contre elle de plus en plus fort. Je m'adapte au rythme qu'elle me réclame avec une servilité passionnée, tapant au fond de son plaisir avec le mien. Elle relève sa jambe, que je viens maintenir droite contre moi. Je m'en sers pour la tirer contre moi lorsque je m'enfonce en elle, je la sens se contracter pour basculer contre moi, elle est infatigable...

La seconde jambe finit par rejoindre la première, resserrant l'entrée glissante de son intimité et me donnant un support plus ferme, me permettant d'intensifier mon inlassable pénétration. Elle se plie à mesure que je m'appuie sur elle pour renforcer notre ébat. J'aime l'entendre jouir, je la crible de mes coups de reins puissants en mordillant tendrement ses mollets et ses chevilles. Sa chair, son corps, son plaisir... toujours plus d'elle...

Je ne peux m'empêcher d'écarter ses jambes en grand pour admirer le spectacle indécent de ses expressions sauvages, de ses muscles qui se contractent avec son visage et sa gorge juste avant qu'elle ne libère ses cris, de ses seins fermes qui s'agitent à chaque fois que je balance mes hanches contre elle. Ses yeux embués de plaisir, son regard imprégné de désir... Je relâche ses jambes, je l'embrasse amoureusement, elle me serre fort contre elle, haletante.

Mes lèvres descendent taquiner la pointe de ses seins que je me surprends à masser inlassablement, puis descendent encore sur son ventre chaud, sur lequel je m'attarde avec autant de plaisir. Enfin, j'arrive face à ses lèvres gonflées, rougies et trempées, que j'embrasse chaudement quelques minutes jusqu'à ce qu'elle me repousse de ses pieds.

Elle se positionne dos à moi, à quatre patte, me sert sa croupe avec un regard enflammé et un sourire fiévreux. « Encore... » me dit-elle en se cambrant à la manière d'un chat qui s'étire. Je lui rends son sourire en saisissant son précieux petit cul que j'embrasse lui aussi sans la faire attendre plus. Je m'enfonce en elle entièrement avec un grognement de satisfaction mêlé à son gémissement. Je ne résiste pas à l'envie de claquer tendrement la paume de la main sur ses fesses qui rebondissent contre moi.

Elle s'élance contre moi, se cramponne aux côtés de mes fesses, j'attrape ses hanches et je pilonne contre les siennes tout mon dévouement à son plaisir comme un culte. Je lui offre une déferlante passionnée de claquements de bassins comme si je voulais marquer sa chair de la mienne, je la tire contre moi par ses fesses en les écartant comme s'il s'agissait de rentrer encore plus profondément en elle. Elle crie à l'horizon son orgasme qui revient, je sens l'intérieur de mes cuisses chauffer doucement.

Mes doigts se perdent dans ses cheveux, je la tire doucement à moi. Elle se redresse tandis que je martèle sa croupe d'une ardeur puissante et déchaînée. De mon autre main, je viens saisir ses seins, sentir son cœur palpiter et ses poumons se vider dans de bruyantes exclamations qui se perdent dans la chute de la falaise. Ses ongles viennent m'agripper l'arrière du crâne pendant que je mordille tendrement le creux de son cou...

Notre coït bestial est à pleine intensité, je sens la chaleur qui se propage dans mon abdomen, je la serre contre moi en refermant une main autour de sa gorge, l'autre sur le sein sous lequel palpite son cœur complexe de Valkyrie qui tambourine à vive allure. Je sens aussi la vibration de son plaisir qui s'échappe par sa gorge sans pudeur. Et son odeur, et son corps, sa peau divinement douce sous laquelle se contractent ses muscles entraînés... Je l'aime...

Je la serre contre moi et je m'enfonce au plus profond d'elle, mes poumons se bloquent, puis relâchent un soupir rauque lorsque j'éjacule dans son bas-ventre quelques longues saccades bouillantes. Mon corps se contracte entièrement, elle m'accompagne en caressant mes hanches de ses ongles, m'offre une affection intime, profonde et amoureuse...

Je me glisse encore lentement dans son intérieur soyeux en tamponnant son dos et ses épaules de mes baisers. Mon corps s'alourdit soudainement, elle me repousse en s'asseyant sur moi, je m'écroule sur le dos. Puis elle se retourne et m'enlace tendrement avant de caler sa tête juste sous mon menton. Mes doigts se baladent sur sa peau soyeuse et se perdent dans la douceur de ses longues mèches, Mon regard s'évade dans l'horizon, et mon esprit s'égare dans le rythme de sa respiration.

Quelques étoiles commencent timidement à parsemer le ciel dégagé. Demain, il va faire beau...
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Histoire de Le_Chien

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